26/02/2018

Les villes prennent l'initiative pour changer le discours sur les migrations : Mechelen s’engage pour promouvoir la diversité et lutter contre le racisme

Située au cœur de la Flandre, dans le nord de la Belgique, Malines (85.655 habitants) est une ville au passé riche et à la vie urbaine florissante. Son tissu urbain est un témoignage unique de la Renaissance nordique européenne et de la révolution industrielle belge, en même temps qu'il rassemble de nombreuses industries et initiatives culturelles actuelles, grâce à sa position centrale dans un axe urbain et économique européen.

En effet, grâce à son attractivité économique croissante depuis une dizaine d’années, plus d'une centaine de nationalités sont désormais établies à Malines, transformant profondément la ville. Aujourd'hui Maline apporte un message clé sur la manière dont les villes peuvent aborder les migrations, en renforçant la cohésion sociale et l'interculturalité de manière à ce que personne ne soit laissé pour compte.

En tant que porte-parole de l'appel de Malines, le maire de la ville – Bart Somers –  réaffirme le rôle central des gouvernements locaux dans les politiques migratoires en raison de leur proximité avec la vie quotidienne des citoyens. Ainsi, pour en savoir plus sur ces messages et sur l'expérience de la ville en matière de migration, la Commission a rencontré le Maire à l'occasion de la Conférence mondiale sur les villes et les migrations qui s'est tenue à Malines.

Source photo: Paul Van Welden (wikiportret.nl)


Pourquoi avez-vous décidé d'accueillir cette conférence ?

Notre ville est très fière d'inviter les Nations Unies et la communauté internationale de gouvernements locaux parce que nous sommes fiers de notre ville. Malines embrasse la diversité et est persuadée que ce n'est pas une mauvaise chose, mais plutôt la nouvelle norme. En ce moment, des gens de 138 nationalités différentes vivent à Malines. Pourtant, nous sommes convaincus que chacune de ces nationalités peut avoir le sentiment d'appartenir à la même communauté.

Le processus d'intégration implique tous les acteurs sociaux et politiques ; tous doivent prendre part à cette nouvelle réalité qu'est la diversité. Malgré la complexité, Malines réussit plutôt bien à cet égard. Nous voulons le montrer au monde, surtout dans un moment où les messages populistes et négatifs sur la migration prennent de plus en plus d’ampleur. Nous croyons qu'il y a un besoin d'exemples positifs. En tant que petite ville, nous pouvons donner de l'espoir dans une période troublée. Nous voulons faire la démonstration auprès du monde entier que vivre ensemble peut être une perspective enrichissante et positive. Plus nous travaillons en ce sens, plus nous le constatons.

Si vous avez une ville qui accepte sa diversité, les gens deviennent plus riches, plus ouverts et apprennent les uns des autres. Et vous devenez plus fort dans un monde globalisé, ayant beaucoup plus de possibilités pour réussir.

Comment travaillez-vous avec les migrants et la diversité à un niveau concret ?

Je voudrais d'abord faire une différence entre les nouveaux arrivants et les personnes descendants de migrants. Pour les nouveaux arrivants, nous nous efforçons qu’ils se sentent accueillis et bienvenus. Quand une personne arrive, elle a un « copain », une personne qui vit à Malines depuis longtemps et connaît la ville. Pendant six mois, ils sont ensemble, pour que le nouveau venu puisse apprendre la langue, découvrir la ville et faire des rencontres de nouvelles personnes, ce qui vous permet d’établir des liens extérieurs à votre environnement d'origine (soit en termes de nationalité, de langue...).

Au début, nous avions aussi des gens qui étaient un peu réticents à l'égard des migrants. Ils disaient « ce sont eux qui doivent s'adapter à nous, pas l'inverse ». Mais après un certain temps, la vérité est que les gens commencent à parler des choses humaines, ils demandent « comment vous sentez-vous ? », Alors le nouveau venu parle de sa famille ou de la maison qu'il ou elle manque, et l’amitié s’installe.



Avec des personnes descendantes de l'immigration, ce que nous essayons de faire, c'est d'éviter la ségrégation. Je souhaite des écoles où les gens de différentes origines peuvent s'asseoir ensemble et avoir les mêmes opportunités.

C'est pourquoi, par exemple, nous essayons d'établir un contact avec les familles et les directeurs d'école afin de promouvoir la diversité en classe. Ce ne peut pas être une bonne chose que la réalité d'un jeune garçon à l'école ne soit pas le reflet de ce que son pays sera dans un avenir proche.

Nous avons besoin d'environnements plus diversifiés afin de stimuler la discussion autour de notre sens de la communauté. Je crois en une ville qui embrasse sa diversité et permet le vivre ensemble entre ses habitants.

Donc, c'est la manière pour vous de combattre la xénophobie ; en assumant ces principes de diversité et en les revendiquant comme des valeurs fondamentales de la ville ?

Bien sûr. Nous luttons contre la xénophobie et le populisme. Les populistes disent qu'ils défendent les valeurs occidentales et j'essaie d'expliquer qu'ils ne le font pas ; ils sont en train de les détruire. Je crois que l'une des choses les plus significatives que nos sociétés puissent offrir est l'idée de « fais ton mieux, travaille dur et obtient une vie meilleure ».

Au lieu de cela, la xénophobie signifie détruire la mobilité sociale. Si génération après génération, les groupes sociaux ne peuvent pas gravir les échelons, à cause de la négativité irrationnelle, notre société ne fonctionne plus. Si vous croyez vraiment en nos valeurs occidentales, vous devez lutter contre la discrimination et le racisme.

La deuxième chose que vous devez faire est de défendre le changement. Certaines personnes disent « d'accord, la diversité va bien, mais nous ne changerons rien à notre façon de vivre ». Je crois qu'ils ne comprennent pas les valeurs sur lesquelles notre société est fondée : la liberté et le dialogue... notre société change tout le temps, donc si les migrants viennent, c'est sûr qu'ils vont changer notre société !

C'est une bonne chose, car cela ne changera pas nos valeurs mais changera la société en raison de nos valeurs.

Quelle serait votre recommandation pour le Pacte Mondial sur les migrations ?

Les institutions nationales et les organisations internationales doivent comprendre que ceux qui sont en première ligne de la politique migratoire et qui ont une attitude positive à l'égard des migrations sont surtout les villes. Nous appelons donc à un pacte mondial qui soutienne les villes et qui leur donne les instruments pour faire leur travail.

Nous appelons à consacrer l'idée que tout le monde a plusieurs identités. Si nous devons explorer comment construire de nouvelles communautés basées sur des identités multiples, je crois que les villes sont l'endroit le plus approprié pour le faire. Les gouvernements et les organisations internationales doivent placer les villes au centre des politiques migratoires.